44

Je connaissais la première partie de l’histoire par Cynthia. Je savais qu’elle avait ignoré le couvre-feu imposé par ses parents. Qu’elle avait prétendu aller chez Pamela. Que Clayton était parti à sa recherche, et l’avait retrouvée dans une voiture en compagnie de Vince Fleming, puis ramenée à la maison.

– Elle était furieuse, raconta Clayton. Elle a hurlé qu’elle aurait voulu nous voir morts. Ensuite elle s’est ruée dans sa chambre, et on ne l’a plus entendue. Elle était saoule. Dieu sait ce qu’elle avait pu boire. Elle a dû s’endormir dès que sa tête a touché l’oreiller. Jamais elle n’aurait dû fréquenter un type comme Vince Fleming. Son père n’était qu’un vulgaire gangster.

– Je sais, répliquai-je, les mains sur le volant, tandis que nous roulions à travers la nuit.

– Bon, comme je disais, c’était une sacrée dispute. Todd, ça l’amusait parfois que sa sœur ait des ennuis, vous savez comment sont les mômes. Mais pas cette fois. Tout était trop moche. Juste avant que je rentre avec Cynthia, il avait demandé que Patricia ou moi l’emmenions acheter une feuille de bristol ou je ne sais quoi. Comme tous les gamins du monde, il s’y prenait au dernier moment, il avait besoin de ça pour un exposé. Il était déjà tard, on ne savait absolument pas où trouver un truc pareil, mais Patricia s’est souvenue que le drugstore en vendait, celui qui restait ouvert vingt-quatre heures sur vingt-quatre, alors elle a dit qu’elle se chargerait d’y conduire Todd.

Clayton toussa, but un peu d’eau. Sa voix s’enrouait.

– Mais d’abord, Patricia avait quelque chose à faire.

Il me regarda, et je tapotai l’enveloppe sous ma veste.

– Ensuite, reprit-il, Todd et elle sont partis dans la voiture de Patricia. Moi, je me suis assis dans le salon, épuisé. Je devais m’en aller deux jours plus tard, reprendre la route, passer quelque temps à Youngstown. Je me sentais toujours un peu déprimé dans ces périodes, au moment de devoir les quitter et retourner auprès d’Enid et Jeremy.

Il suivit un instant des yeux un semi-remorque que nous étions en train de doubler.

– Je trouvais que Todd et sa mère étaient partis depuis longtemps, poursuivit-il. Cela faisait bien une heure. Le drugstore n’était pas si loin que ça. El puis le téléphone a sonné.

Clayton inspira plusieurs fois à fond.

– C’était Enid. Qui appelait d’une cabine publique. Elle a dit : « Devine qui c’est ? » Je suppose que, d’une certaine manière, j’avais toujours attendu cet appel. Mais je n’aurais jamais pu imaginer qu’elle pouvait faire ce qu’elle venait de faire. Elle m’a dit de la retrouver sur le parking du Denny’s. De me grouiller. Qu’un gros travail nous attendait. Elle m’a demandé de prendre un rouleau d’essuie-tout. J’ai foncé hors de la maison, roulé à toute vitesse jusqu’au Denny’s. Je pensais qu’elle attendait peut-être dans le restaurant, mais elle était assise dans sa voiture. Elle ne pouvait pas en sortir.

– Pourquoi ?

– Elle ne pouvait pas se promener avec tout ce sang sur elle sans attirer l’attention.

Je me sentis soudain glacé.

– Quand j’ai couru vers sa portière, j’ai d’abord cru qu’elle avait les manches couvertes d’essence. Elle était si calme. Elle a baissé la vitre, m’a dit de monter. J’ai obéi, et alors j’ai vu que c’était du sang qui la recouvrait partout. Sur les manches de son manteau, le devant de sa robe. J’ai crié : « Qu’est-ce que tu as fait ? Putain, mais qu’est-ce que tu as fait ? » Mais je le savais déjà. Enid s’était garée devant notre maison. Elle avait dû arriver quelques minutes après que j’étais rentré avec Cynthia. Son adresse figurait sur la facture de téléphone. Sans doute avait-elle vu ma voiture dans l’allée, mais avec une plaque du Connecticut. Ensuite Patricia et Todd sont partis en voiture, et elle les a suivis. À ce moment-là, la colère devait l’aveugler. Elle a compris que j’avais une seconde vie, une autre famille. Elle les a suivis jusqu’au drugstore. Puis dans le magasin, faisant semblant d’acheter quelque chose en les surveillant du coin de l’œil. Voir Todd de plus près a dû lui faire un sacré choc. Il ressemblait tellement à Jeremy. Ça a dû tout déclencher.

Enid était sortie du drugstore avant Patricia et Todd, et avait couru à sa voiture. Le parking était presque désert, personne dans les parages. Tout comme, des années plus tard, elle garderait une arme à portée de main en cas d’urgence, Enid conservait à l’époque un couteau dans la boîte à gants. Elle s’en était emparée, était retournée à toute allure vers le magasin, s’était cachée dans un renfoncement, plongé dans l’ombre à cette heure tardive. C’était une large allée, qu’empruntaient les camions de livraison.

Todd et Patricia avaient quitté le drugstore à leur tour. Todd avait sa feuille de bristol roulée dans un énorme tube, et la portait sur l’épaule comme un soldat porte son fusil.

Enid avait émergé de l’obscurité.

« Au secours ! » avait-elle crié.

Todd et Patricia s’étaient arrêtés, l’avaient dévisagée.

« Ma fille ! avait gémi Enid. Elle est blessée ! »

Patricia s’était précipitée à sa rencontre, suivie de Todd.

Enid les avait entraînés de quelques pas dans l’allée, puis s’était retournée vers Patricia.

« Vous ne seriez pas la femme de Clayton, par hasard ? »

– Patricia a dû être complètement sidérée, fit observer Clayton. D’abord cette femme réclame de l’aide, et ensuite, sans crier gare, elle lui pose cette question.

– Qu’est-ce qu’elle a répondu ?

– Elle a répondu oui. Alors le couteau lui a traversé la gorge. Enid n’a pas hésité une seconde. Alors que Todd essayait encore de comprendre ce qui se passait – il faisait noir, souvenez-vous –, elle était déjà sur lui, et tailladait sa gorge aussi vite qu’elle venait de taillader celle de sa mère.

– Elle vous a raconté tout ça ? demandai-je. Enid vous a raconté cette scène ?

– Des centaines et des centaines de fois, répondit Clayton d’une voix sourde. Elle adore en parler. Encore maintenant. Elle appelle ça évoquer les souvenirs.

– Et ensuite ?

– Ensuite elle s’est dirigée vers une cabine téléphonique voisine et m’a appelé. Quand je l’ai rejointe dans sa voiture, elle m’a dit ce qu’elle avait fait : « Je les ai tués. Ta femme et ton fils. Ils sont morts. »

– Elle ne savait pas, murmurai-je.

Clayton acquiesça en silence dans la pénombre.

– Elle ne savait pas que vous aviez aussi une fille.

– Je pense, suggéra Clayon, à cause du côté symétrique de l’affaire, peut-être. J’avais une femme et un fils à Youngstown, et une femme et un fils à Milford. Un second fils qui ressemblait au premier. Les deux histoires paraissaient si parfaitement semblables. Comme une image en miroir. Ça l’a incitée à en tirer certaines conclusions. Je voyais bien, à sa façon de parler, qu’elle ignorait que Cynthia se trouvait à la maison, et même son existence. En fait, elle ne m’avait pas vu rentrer avec elle.

– Et vous n’alliez certainement pas lui dire.

– J’étais sans doute en étal de choc, mais j’ai quand même eu cette présence d’esprit. Enid a mis le contact, roulé vers l’allée, et m’a montré leurs corps. « Tu vas devoir m’aider. Il faut s’en débarrasser », m’a-t-elle annoncé.

Clayton s’interrompit, et ne prononça plus un mot pendant au moins un kilomètre. Je crus un instant qu’il était mort.

– Clayton, ça va ?

– Oui.

– Qu’est-ce qu’il y a ?

– C’était le moment crucial. J’avais le choix, mais j’étais peut-être trop choqué pour m’en rendre compte, pour comprendre quelle était la bonne décision à prendre. J’aurais pu tout de suite mettre un terme à tout ça. J’aurais pu refuser de l’aider. J’aurais pu prévenir la police. J’aurais pu la livrer aux flics. C’était le moment ou jamais. J’aurais pu stopper toute cette folie.

– Mais vous ne l’avez pas fait.

– Je me sentais déjà coupable. Je menais une double vie. J’aurais été perdu. Déshonoré. Je suis sûr qu’on m’aurait inculpé. Pas des meurtres de Patricia et Todd. Mais épouser plusieurs femmes, à moins d’être mormon, il me semble que c’est illégal. J’avais de faux papiers d’identité, ce qui constituait sûrement une fraude, même si je n’ai jamais eu l’intention de violer la loi. J’ai toujours essayé de vivre dans la moralité, d’être un homme droit.

Je lui jetai un coup d’œil.

– Et de plus, bien sûr, Enid avait probablement deviné mon état d’esprit, poursuivit-il. Car elle m’a prévenu que si j’appelais la police, elle prétendrait qu’elle m’avait seulement prêté main-forte. Que c’était mon idée, que je l’avais forcée à accepter. Alors je l’ai aidée. Que Dieu me pardonne, je l’ai aidée. On a replacé Patricia et Todd dans la voiture, en laissant le siège du conducteur vide. J’avais une idée de l’endroit où abandonner la voiture, avec eux à l’intérieur. Une carrière. Un peu à l’écart de la route que je prenais souvent pour mes allers-retours. Un jour, en retournant à Youngstown, j’y avais traîné sans but, pour retarder le moment de rentrer, et j’avais découvert un petit chemin qui montait en haut d’une colline avec un à-pic sur une carrière abandonnée. Il y avait un petit lac au fond. J’y étais resté un bon moment, avec l’idée de sauter dans le précipice. Mais, à la fin, j’y avais renoncé. Je m’étais dit qu’en tombant dans l’eau, il n’était pas sûr que je meure.

Clayton toussa encore, but une nouvelle gorgée d’eau.

– Il fallait laisser une des voitures sur le parking. J’ai pris le volant de l’Escort de Patricia, roulé pendant deux heures et demie en pleine nuit, en direction du nord. Enid me suivait dans sa voiture. Ça m’a pris un moment, mais j’ai retrouvé le chemin de la carrière. Une fois en haut, j’ai bloqué l’accélérateur avec une pierre après avoir mis au point mort, puis j’ai enclenché la marche avant, sauté hors de la voiture, qui est tombée dans le précipice. Elle a touché l’eau quelques secondes plus tard. On ne voyait pas grand-chose. Il faisait si sombre en bas que je n’ai même pas vu la voiture disparaître sous la surface.

Tout essoufflé, il s’accorda un instant pour récupérer.

– Ensuite, il nous a fallu retourner chercher ma voiture. Et après on est tous les deux de nouveau repartis dans l’autre sens, dans les deux véhicules, à Youngstown. Je n’ai même pas eu la possibilité de dire au revoir à Cynthia, de lui laisser un mot, rien. J’ai simplement disparu.

– Quand est-ce qu’elle l’a découvert ? demandai-je.

– Comment ?

– Quand Enid a-t-elle découvert qu’elle n’avait pas éliminé toute votre seconde famille ?

– Quelques jours après. Elle regardait les infos, dans l’espoir de saisir un communiqué quelconque, mais les chaînes ou les journaux de Buffalo couvraient peu l’affaire. Je veux dire, il ne s’agissait pas d’un meurtre. Il n’y avait aucun corps. Il n’y avait même pas de sang dans l’allée près du drugstore. Un orage avait éclaté dans la matinée, et lavé toutes les traces. Mais elle est allée à la bibliothèque – Internet n’existait pas à l’époque, évidemment – pour vérifier dans des journaux d’autres villes et d’autres États, et elle a repéré quelque chose. Un article de journal intitulé : « La famille d’une adolescente disparaît », je crois. Elle est rentrée à la maison, je ne l’avais jamais vue dans une fureur pareille. Elle s’est mise à casser la vaisselle, à jeter des objets. Elle était hystérique. Elle a mis des heures à se calmer, ajouta Clayton.

– Mais il fallait bien qu’elle s’y fasse.

– Au début, elle a refusé. Elle a fait ses bagages pour retourner dans le Connecticut et finir le travail. Mais je l’en ai empêchée.

– Comment y êtes-vous parvenu ?

– J’ai passé un pacte avec elle. Je lui ai fait une promesse. Je lui ai juré de ne jamais la quitter, de ne jamais rien refaire de ce genre, de ne jamais, jamais, tenter de contacter ma fille, à condition qu’elle épargne sa vie. « C’est tout ce que je te demande, lui ai-je dit. Laisse-la vivre, et je passerai la fin de mes jours à me racheter de t’avoir trahie. »

– Et elle l’a accepté ?

– À contrecœur. Mais je crois que ça l’a toujours titillée, comme une démangeaison dont on ne peut pas se soulager. Un boulot pas fini. Tandis qu’aujourd’hui, il y a urgence. Puisqu’elle sait pour le testament. Elle sait que si je meurs avant qu’elle tue Cynthia, elle perdra tout.

– Qu’est-ce que vous avez fait, alors ? Vous avez continué comme ça, c’est tout ?

– J’ai arrêté les tournées. J’ai changé de job, monté ma propre boîte, travaillé à la maison, et, par la suite, à Lewiston. Enid m’a clairement fait comprendre qu’il n’était plus question que je sois sur les routes en permanence. Elle ne se ferait plus avoir. Il m’arrivait de songer à m’enfuir, à retourner chercher Cynthia. Je lui aurais tout avoué, je l’aurais emmenée en Europe, pour nous cacher. Nous aurions vécu sous un nom différent. Mais je savais que je me planterais, que je finirais par laisser une trace derrière moi, et que ma fille mourrait par ma faute. Et puis, c’est difficile d’obtenir d’une gamine de quatorze ans une telle compréhension de la réalité. Alors je suis resté avec Enid. On était désormais liés par un lien bien plus puissant que le meilleur mariage du monde. On avait commis un crime atroce ensemble – Clayton marqua une pause et ajouta : Liés jusqu’à ce que la mort nous sépare.

– Et la police ne vous a jamais interrogés, n’a jamais rien soupçonné ?

– Jamais. J’ai attendu. La première année a été la pire. Chaque fois que j’entendais une voiture s’arrêter dans l’allée, je pensais que ça y était. Ensuite une deuxième année est passée, une troisième, et dix ans se sont écoulés sans qu’on s’en rende compte. On se demande, alors qu’on meurt à petit feu chaque jour, comment la vie peut durer si longtemps.

– Vous avez forcément fait quelques déplacements, avançai-je.

– Non, plus aucun.

– Vous n’êtes jamais retourné dans le Connecticut ?

– Je n’ai plus remis les pieds dans cet État depuis cette nuit-là.

– Alors comment vous y êtes-vous pris pour déposer les enveloppes d’argent ? Cet argent qui a aidé Tess à élever Cynthia, à payer les études de votre fille ?

Clayton me dévisagea plusieurs secondes. Il m’avait raconté tant de choses qui m’avaient choqué, mais là, pour la première fois, c’était moi qui le surprenais.

– Qui vous a parlé de ça ? demanda-t-il enfin.

– Tess. Mais très récemment.

– Elle n’a pas pu vous dire que ça venait de moi.

– Non. Elle m’a juste dit avoir reçu de l’argent, et même si elle avait sa petite idée, elle n’a jamais su qui le lui envoyait.

Clayton garda le silence.

– C’était vous, n’est-ce pas ? Vous économisiez de l’argent pour Cynthia, en cachette d’Enid, exactement comme lorsque vous établissiez votre second foyer.

– Enid a eu des soupçons. Des années plus tard, alors qu’on se préparait à subir un contrôle fiscal, Enid a fait appel à un comptable. Ils ont épluché des années d’anciens relevés et trouvé des irrégularités. J’ai dû inventer une histoire, leur dire que j’avais détourné des sommes pour des dettes de jeu. Mais elle ne m’a pas cru. Elle m’a menacé d’aller dans le Connecticut et de tuer Cynthia, comme elle aurait dû le faire des années plus tôt, si je ne disais pas la vérité. Alors j’ai avoué avoir envoyé de l’argent à Tess, pour l’aider à payer les études de Cynthia. Mais j’avais tenu ma promesse : je ne l’avais jamais contactée, et, pour autant que je le sache, Cynthia me croyait mort.

– Donc, durant toutes ces années, Enid a également nourri de la rancune envers Tess.

– Elle lui en voulait d’avoir touché de l’argent qu’elle estimait lui appartenir. Cynthia et Tess étaient les deux femmes qu’elle haïssait le plus au monde, tout en n’ayant jamais rencontré aucune d’elles.

– Alors cette histoire comme quoi vous n’êtes jamais retourné dans le Connecticut, même si vous n’avez effectivement pas revu Cynthia, c’est des bobards.

– Non, répliqua Clayton. C’est la vérité.

Et je réfléchis à cela durant un moment tandis que nous poursuivions notre route au cœur de la nuit.

Cette Nuit-Là
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